Témoignage de Vanessa

 

Témoignage de Vanessa

Je m’appelle Vanessa. J’ai 28 ans. Mon SED type vasculaire a été diagnostiqué à mes 20 ans lors de ma première perforation intestinale. J’ai mis longtemps à me décider à partager mon expérience avec vous. Mais voilà, une opération chirurgicale que je viens de subir va probablement changer ma vie. Je tiens donc à partager cela avec vous. Ce récit se veut être un témoignage positif qui vous aidera, je l’espère, à aller de l’avant avec la maladie.

Avant le diagnostic

Comme beaucoup d’entre vous j’imagine, mon enfance a été bercée régulièrement par le ronronnement des machines dans les hôpitaux ; c’est peut-être cela d’ailleurs, qui m’a poussé à suivre des études scientifiques et à travailler dans les laboratoires de recherche médicale, métier que j’exerce aujourd’hui. De consultation en consultation, essayer d’expliquer mes hématomes spontanés énormes et parfois handicapants et mes saignements abondants, tel a été l’objectif. Hémophilie ? Mais non, ce n’est que pour les garçons ! Maladie de Willebrandt : OK ! avec un taux de facteur Willebrandt légèrement en dessous de la normale…Voilà, on a enfin trouvé une étiquette à mettre sur mes symptômes !

Le diagnostic et la première série d’ennuis

Lors d’un séjour au Canada, première perforation intestinale (au niveau de l’intestin grêle). Qu’est ce que j’ai bien pu manger pour en arriver là ? Telle a été ma première réaction. Rapatriement en France et hospitalisation dans le service de gastro-entérologie de l’hôpital Cochin où un jeune médecin se souvenait vaguement d’un exemple de maladie mis entre parenthèses dans ses cours, maladie qui provoquerait des perforations spontanées de l’intestin. Un matin, il me réveille à 5 heures pour me dire « C’est çà, c’est le syndrome d’Ehlers-Danlos ! ». Changement d’étiquette ! Chouette ! Quoique je préférais l’autre, elle me semblait moins grave. Le diagnostic est donc confirmé après un check-up en hôpital de jour à Necker.

Après avoir repris quelques kilos (j’en avais perdu dix à cause de ma perforation), je repars au Canada pour y effectuer mon contrat de travail d’un an. Pendant ce temps, ma maman prend contact avec l’AFSED et se rend à sa première journée AFSED. Les nombreux soutiens de la part des membres de l’AFSED l’ont rassurée et soulagée. Elle me fait part des messages de soutien qui m’étaient adressés et de tout ce qu’elle a appris sur le SED.

Malheureusement, une deuxième perforation va encore me freiner dans mon élan. Alors que je travaillais depuis 6 mois au Canada, me voilà encore dans un hôpital. Cette fois-ci, c’est le côlon qui est touché. Plus grave…L’opération se passe bien et une colostomie est faite en vue d’un rétablissement de continuité 6 mois plus tard.

R La colostomie est une petite partie du côlon qui est sorti et attaché à la surface du ventre pour permettre une évacuation des selles(récupérées dans une poche), et qui permet ainsi de laisser le reste du côlon au repos pour une meilleure cicatrisation. Dans le cas d’une perforation, il s’agit donc toujours d’une colostomie provisoire qui sera réopérée après cicatrisation complète du côlon ; cette opération est appelée « rétablissement de continuité » et a lieu 3 mois minimum après la première opération.

Enfin, ma visite des hôpitaux de Montréal s’achève sur une rupture du tendon rotulien. Ah oui ! J’avais oublié de vous dire que j’étais casse-cou. Après ces 3 opérations québécoises, je suis découragée et rentre en France où l’on me réopère pour le rétablissement de continuité du côlon (hôpital Mondor, Créteil). Fin du premier acte…

Deuxième série d’ennuis

On dirait que le SED a décidé de me laisser un peu tranquille. Quatre années sans hôpitaux ou presque. Le rêve ! Je vais enfin pouvoir faire des projets ! Je me marie et pars faire un voyage de noces en Indonésie. Seulement deux jours après mon retour en France : perforation du côlon. J’ai eu très chaud ! Deux jours avant et j’y passais …Je suis opérée 4 heures seulement après mes premières douleurs, vue l’urgence du tableau. Comme la précédente opération, je suis réopérée au bout de 3 mois pour le rétablissement de continuité. La série continue avec une quatrième perforation, quelques mois seulement après mon rétablissement de continuité. Cette fois-ci, j’ai vraiment failli y passer. Le chirurgien m’opère au plus vite. Après une semaine de soins intensifs, je récupère progressivement.

L’ultime opération ?…

A ce stade, un bilan s’impose : 4 perforations intestinales, 2 ruptures du tendon rotulien soit 8 opérations en 6 ans, et le risque vital de plus en plus présent. Y aurait-il une solution pour mettre un terme à toutes ces souffrances ? Je n’en peux plus et les chirurgiens ont de plus en plus de mal à m’opérer au niveau du ventre (ma paroi abdominale est extrêmement fragilisée…). Et si on l’enlevait, ce maudit côlon qui me fait tant souffrir ? Le chirurgien me dit que lors des précédentes opérations, il a trouvé mon côlon d’un aspect plutôt atypique. Vu mes antécédents, il est fort probable que d’autres perforations surviennent. Si on m’enlevait le côlon (= colectomie), on enlèverait 90% des risques de perforation intestinale. Pour moi, c’est inespéré !

R La colectomie totale consiste à enlever le côlon, et à joindre directement l’intestin grêle au rectum. C’est une opération courante en chirurgie digestive, notamment dans le cadre de cancers du côlon.

Après de longues réflexions entre les chirurgiens de l’hôpital Mondor et les docteurs Boutouyrie et Perdu de l’hôpital Pompidou (spécialisés dans le SED), la colectomie est envisagée. J’ai donc été opérée le 7 novembre dernier. L’opération s’est très bien passée et je me suis remise assez rapidement. Vous devez vous demander si on peut vivre sans côlon et si cela n’engendre pas de grosses contraintes sur la qualité de vie. Et bien oui, on peut vivre sans côlon et non, il n’y a aucune contrainte. Si ce n’est, un transit intestinal accéléré qui se régule rapidement après l’opération, avec au besoin un traitement médicamenteux à base d’anti-diarrhéiques.

Voici donc le récit de mes 20 ans. Les plus belles années…Pas pour moi ! Cependant, durant ces années de galère, je n’ai jamais cessé d’être optimiste et de faire des projets. Même si je n’ai pas pu aller au bout à chaque fois, cela m’a permis de rebondir après chaque opération. Ce n’est pas la maladie qui va m’arrêter et je veux profiter de la vie autant que les autres. Avoir un enfant : peut-être mon prochain combat avec le SED ?

Je dédie ce récit à ma maman qui m’a quittée trop vite dans ce combat.

Je profite de ce témoignage pour remercier infiniment le docteur Boutouyrie qui s’est beaucoup investi en partageant ses connaissances sur le SED avec les chirurgiens de l’hôpital Mondor, afin d’encadrer au mieux ma dernière opération ; chirurgiens que je remercie bien sûr et notamment le Dr Tayar qui m’a sauvé la vie à plusieurs reprises et le Dr Brunetti, auteur de ma plus belle opération…

Enfin, un grand merci aux membres de l’AFSED, notamment ma chère Magali, qui m’ont soutenu et conseillé dans les moments difficiles.
Vanessa